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Musique classique

L'effet Gustavo

L'effet Gustavo
L'effet Gustavo

La venue de Gustavo Dudamel avec son orchestre Simón Bolívar était un des évènements marquants des festivités organisées pour les 10 ans de la Philharmonie de Paris. Ces musiciens et leur chef emblématique étaient déjà présents lors de la première saison en 2015 avec une cinquième symphonie de Mahler inoubliable. Au programme cette fois deux concerts, d'une part la troisième symphonie de Mahler avec Marianne Crebassa et les choeurs de femmes et d'enfants de l'Orchestre de Paris et d'autre part un programme avec Yuja Wang jouant le premier concerto de Tchaikowski couplé à des musiques d'Amérique du Sud et au Boléro (année Ravel oblige).

La troisième symphonie de Mahler est le chef d'oeuvre que l'on sait. La vision qu'en propose Gustavo Dudamel est assez classique mais d'une puissance phénoménale. Il faut dire que l'Orchetre Simon Bolivar pourrait en remontrer à plus d'un ensemble européen. Il sonne d'ailleurs plus américain (quels cuivres !) qu'européen ce qui n'est pas une surprise. Le solo de cor de postillon joué depuis le fond du parterre par Pacho Flores (ici en photo avec Gustavo Dudamel) est d'une précision phénoménale qui rappelle celle de Maurice André. Il faut dire que cet instrumentiste du Sistema a gagné le concours Maurice André. Marianne Crebassa, à la voix ambrée et puissante à la fois, investit son intervention même si son allemand pourrait être plus projeté. Les choeur de femmes, de jeunes et d'enfants de l'Orchestre de Paris répondent aux sollicitations de nuances et de rythme du chef avec une joie et un enthousiasme visibles. Le final joué dans un tempo retenu est à pleurer d'émotion et son apothéose finale avec 2 timbaliers complices parfaitement synchronisés qui dominent l'orchestre est majestueuse. Magistrale exécution. L'accueil du public debout pendant 15 minutes est à la hauteur de l'émotion dégagée par une interprétation d'une puissance émotionnelle hors du commun. En premier partie le chœur avait interprété avec toute la douceur et la passion nécessaires deux courtes pièces a capella composées par José Antonio Abreu, le fondateur tant aimé d'El Sistema. Autre beau moment chargé de beauté, de sens, d'émotion, en un mot de vie.

Le lendemain la salle Pierre Boulez est tout aussi pleine pour un concert plus bigarré. Au programme,  le premier concerto de Tchaikovski avec la star américaine-chinoise Yuja Wang que Dudamel connaît bien pour avoir notamment  enregistré les concertos de Rachmaninov avec son orchestre, le Los Angeles Philharmonic. Sa lecture est technique, précise et en connection avec le chef même si au début se produit un léger décalage piano/orchestre, qu'un regard de Yuja Wang à Dudamel confirme. Mais l'aisance et la puissance pianistique sont là, l'équilibre piano/orchestre parfait, et l'interprétation de l'orchestre à la fois élégante et passionnée. En bis, Yuja Wang joue avec enthousiasme et un plaisir manifeste la Danzon N°2 du mexicain Arturo Márquez avec en tourneur de page un Dudamel hilare et drôle. 

Les deux pièces latino toute de rythme et de couleur donnés à chaque début de première partie mettent en valeur la souplesse stylistique de cet ensemble unique qui peut décidément tout jouer. La pièce qui débute la seconde partie fait notamment appel à un guitariste, Jorge Glem, qui joue un instrument typiquement vénézuélien à 4 cordes. Le moins que l'on puisse dire est que ce musicien à de l'or dans les doigts.

Place ensuite au Boléro de Maurice Ravel. Gustavo Dudamel s'y révèle un maître dans la construction du crescendo et dans l'alliage des timbres. Depuis quand n'a t-on pas entendu un Boléro aussi équilibré permettant de goûter non seulement les interventions solistes (le trombone tellement investi qu'il dérape un court instant) mais aussi les voix secondaires, on pense notamment aux flûtes au début de l'oeuvre qui scandent le rythme de la caisse claire. Chapeau les artistes. Les dernières mesures sont telluriques.

Mais comme ces musiciens en plus d'être talentueux sont généreux ils nous offrent en premier bis leur célèbre Mambo extrait du West Side Story de Bernstein en y ajoutant leur inimitable pâte festive. Un régal suivi d'un délire dans la salle. Un bis en appelant un autre, Jorge Grem revient avec sa guitare à 4 cordes pour jouer une pièce avec un violoniste et un contrebassite de l'orchestre. Nouveau délire général. Sans aucun doute ces deux concerts seront  inoubliables pour les chanceux présents ce soir à la Philharmonie de Paris.

Gustavo Dudamel par son talent, sa générosité, son amour visible des gens est vraiment le Leonard Bernstein du XXI ème siècle. Et Dieu sait si notre époque malade a besoin de personnalités de cette nature. Et ce n'est pas un hasard si ce chef hors du commun prendra en 2026 la direction de l'Orchestre Philharmonique de New-York qui a eu dans ses directeurs certes l'austère  Gustav Mahler mais aussi le fantasque et génial Leonard Bernstein...

Muchas Gratias Gustavito et El Sistema. Bravissimo. On vous aime. Revenez nous vite !

Samedi 11 janvier 2025 

José Antonio Abreu (1939-2018)

Sol que das vida a ls trigos, Luz Tú

Gustav Mahler, Symphonie N°3 en ré mineur

Pacho Flores, cor de postillon

Marianne Crebassa, mezzo-soprano

Choeur d'enfants, de jeunes, de femmes de l'Orchestre de Paris (direction Richard Wilberforce)

Orchestre symphonique Simón Bolívar

Direction :  Gustavo Dudamel

Dimanche 12 janvier 2025

Richard Lorenz (né en 1961), Todo Terreno

Piotr Ilitch Tchaikowski, Concerto pour piano N°1 en si bémol mineur op.32 

Yuja Wang, piano

Gonzalo Grau (Né en 1972), Concerto pour cuatro et orchestre, "Odisea"

Jorge Glem, cuatro

Maurice Ravel (1875-1937), Boléro

Orchestre symphonique Simón Bolívar

Direction : Gustavo Dudamel

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